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Les horloges publiques : un aspect méconnu du mécénat du duc Jean de Berry
Dans la France du bas Moyen Age, l’horlogerie restait une technologie au service de la grande aristocratie qui protégeait alors les rares hhorlogers comme elle le faisait avec ses architectes, peintres et sculpteurs. Le grand mécène Jean de Berry (1340-1416) participa lui aussi à ce phénomène et notamment par la multiplication des tours d’horloge en place publique. Beaucoup reste à dire sur cet aspect méconnu de sa contribution à l’art. À travers les cas bien documentés des deux horloges publiques qu’il installa à Bourges et Poitiers, nous sommes en mesure de percevoir – au-delà de la prouesse technique – toute la portée sociale et politique de ces programmes conjuguant les volontés communes de Jean de Berry et communautés urbaines. -
"Le règne de la nuit désormais va finir". L'invention et la diffusion de l'éclairage public dans le royaume de France (1697-1789)
La thèse propose d'appréhender les débuts de l’éclairage public avant l’invention du gaz et de l’électricité, comme un objet d'histoire urbaine totale. Elle analyse le processus d'introduction, de diffusion et d’appropriation de l'éclairage public à l’échelle du royaume de France entre 1697 – date à laquelle les lanternes publiques sont imposées par la monarchie dans les principales villes du royaume de France – et la période révolutionnaire. Si la mesure est d’abord contestée par les municipalités et une partie des habitants, l’éclairage devient à partir des années 1770 une marque d'urbanité et un instrument de contrôle. À partir de l'abondante documentation des archives municipales, départementales et nationales, la thèse étudie le passage de l’ « illumination » à l’ « éclairage public ». Il s’agit de saisir le cheminement du processus décisionnel entre le pouvoir central, provincial et local, ainsi que la circulation des savoirs et des expériences en matière d’éclairage. L’intérêt grandissant des populations urbaines pour ce nouvel objet technique permet son amélioration puis l’adoption du réverbère qui remplace la lanterne à chandelle à l’orée de la Révolution. La thèse analyse également les conditions économiques, financières et sociales du développement de l’éclairage, à travers la figure de l’entrepreneur, de l’allumeur et le recours aux experts. L’influence de la compagnie Tourtille Sangrain joue un rôle déterminant dans la diffusion de l’éclairage urbain durant le dernier tiers du XVIIIe siècle. Il s'agit enfin d'interroger la réception de l’innovation par les citadins et la "révolution culturelle" (D. Roche) induite dans les usages nocturnes de la ville. -
Le costume et la ville. Le vêtement populaire parisien d'après les inventaires du XVIIe siècle
L'utilisation systématique des inventaires populaires — quatre cents sont ici questionnés — permet de mettre en valeur les phénomènes de possession, de transmission et de consommation dans l'ordre vestimentaire. Ils révèlent le passage d'une économie du costume fait pour durer à une première diffusion de la consommation de masse; tissus, couleurs, formes sont les éléments principaux de cette substitution capitale. De surcroît, l'inventaire permet de s'interroger sur la répartition des attitudes selon les rôles, l'âge, le sexe, les niveaux économiques, la qualification professionnelle. Les rôles des femmes, des domestiques et des aisés de la pauvreté sont ainsi mis en valeur et l'anthropologie des classes populaires du Paris du XVIIIe siècle prend sens. Systematic use of popular inventories — here four hundred have been consulted — brings to light the phenomena of ownership, transference and consumerism in matters of dress. They reveal the transition from an economy of clothing built to last, to the beginnings of mass consumption; fabric, colour and cut provide the chief elements of this important substitution. The inventory moreover opens an inquiry into the distribution of attitudes according to roles — age, gender, economic level, professional qualification. Thus the roles of women, servants and those in the higher echelons of poverty are emphasised, and the anthropology of the popular classes in XVIIIth century Paris takes shape. -
La ville et l’esprit de société
Apparue dans le champ historique avec les travaux fondateurs de Maurice Agulhon, la notion de sociabilité s’est révélée une grille d’analyse pertinente pour une histoire socio-culturelle attachée à comprendre les transformations du siècle des Lumières, les mutations de la culture politique et la genèse de l’opinion publique, le passage d’une société aristocratique à une société bourgeoise et le lien entre l’émergence d’une sphère publique et l’expansion d’un capitalisme commercial. Ces problématiques sont au cœur des sujets abordés dans ce volume, qui s’intéresse à un type spécifique de sociabilités urbaines : celles, plutôt élitaires, qui ont été regardées comme les laboratoires d’idéaux nouveaux, étrangers, sinon antagoniques avec ceux de l’univers de la cour. Les contributions rassemblées soumettent à un nouvel examen et nuancent le schéma de la formation, entre le xviie et le xviiie siècle, d’un espace public urbain défini par sa différence avec la cour ou les académies, ou par opposition à la sphère privée, domestique, à l’espace du secret initiatique ou encore au domaine clos des cabinets et des galeries scientifiques et artistiques. -
Ordre textuel et ordre spatial à Lyon à l'époque moderne. Du parcours de visite au rôle nominal, une spatialité implicite
Ce numéro d’Histoire & Mesure, deuxième volet d'une thématique consacrée à la ville et à ses mesures, s'attache à saisir comment certains groupes d'acteurs s'approprient l'espace de leur ville, et à découvrir des logiques de l'économie et de la croissance urbaines. Un premier article porte sur l'étude du corps de l’épicerie parisienne au XVIIe et au XVIIIe siècle en lien avec la politique fiscale de la monarchie (M. Marraud) ; un deuxième étudie l'évolution des usages socio-économiques observés autour du bassin de La Villette au nord de Paris (I. Backouche). À partir d'une exploitation fine des sources cadastrales à Bordeaux au XIXe siècle, S. Schoonbaert analyse le renouvellement de son parc immobilier ; L. Bonneval & F. Robert s'attachent à mesurer la rentabilité de l'investissement pour l'immobilier locatif à Lyon (1890-1968). Une autre perspective de ce numéro repose sur des expériences de restitution et de remodelage du maillage urbain : V. Chabrol présente l'opération de remembrement dans la redéfinition de la ville, le cas de la reconstruction d'Yvetot (1940-1945). Pour Lyon à l'époque moderne, B. Gauthiez et O. Zeller présentent la spatialisation de sources écrites que sont les parcours de visite, confrontées aux plans de censive. Un dernier article de Varia (M.-L. Legay) centre son objet sur l'étude comparative de la science comptable en France et en Autriche, en s'appliquant à mettre en évidence la « supériorité » de la comptabilité camérale sur les options colbertistes, au XVIIIe siècle. -
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Les atouts des systèmes d'information géographique – (SIG) pour « faire de l'histoire » (urbaine)
La plupart des historiens n’ont pas utilisé les Systèmes d’Information Géographique (SIG) jusqu’au milieu des années 1990. Depuis, les potentialités de ces derniers pour la recherche historique sont mieux connues et les conférences organisées par la Social Science History Association y sont pour beaucoup. Maurice Garden et Jean-Luc Pinol présentent la manière dont ils ont utilisé les SIG pour l’Atlas des Parisiens. La puissance du géocodage à l’adresse permet d’utiliser les nombreuses données des Annuaires. La spatialisation des données améliore la connaissance de l’espace urbain parisien et suggère de nouvelles interprétations. Avec les ressources des SIG, on peut calculer la fréquence d’un phénomène et calculer le rapport de cette valeur à la population, ce qui fournit souvent une distribution plus interprétable. Les SIG fournissent une large palette d’outils permettant de représenter l’extension, la densité ou le niveau d’une activité et, ainsi, de mieux comprendre le fonctionnement de la ville dans des domaines aussi différents que l’industrie, la démographie, l’impact des guerres, les problèmes de santé, la culture ou la religion. -
L’autel : fonctions, formes et éléments
AvertissementLe texte qui suit est un extrait du Vocabulaire typologique et technique du mobilier religieux, manuscrit collectif dont la publication avait été envisagée dans la collection des Principes d’analyse scientifique de l’Inventaire. La parution récente du Thesaurus multilingue des objets religieux ne permet pas d’envisager à court terme la publication de ce manuscrit dont seul le chapitre concernant l’autel et son environnement (meubles, objets et linges) est aujourd’hui achevé. Il n... -
Des procès innombrables. Éléments méthodologiques pour une histoire de la justice civile d’Ancien Régime
Longtemps négligées par les historiens, qui leur préféraient l’étude du contentieux criminel, les archives civiles des tribunaux d’Ancien Régime commencent à émerger dans les préoccupations des chercheurs. Ces documents s’avèrent en effet très riches, tant dans la perspective de l’histoire de la société que de l’analyse de la justice comme institution sociale. Pour rendre compte de cette richesse, les méthodes sérielles sont nécessaires (mais pas suffisantes) : parce que la masse des sources est considérable (on a peut-être vingt affaires civiles pour une affaire criminelle) et parce que leur contenu individuel est souvent pauvre et décevant. Néanmoins, ceux qui veulent tenter un large dépouillement de sources civiles sont confrontés à de nombreuses difficultés : notre article les présente et propose quelques réponses. On examinera d’abord les problèmes d’établissement du corpus, puis ceux posés par les principaux critères d’analyse (identité des parties, durée et nature des litiges, etc.). On donnera enfin quelques exemples de questionnements auxquels les archives civiles peuvent être soumises, dans la perspective d’une histoire qui fait de la justice une activité sociale à part entière.