LE GUET ET LA GARDE DE PARIS A LA FIN DE L'ANCIEN RÉGIME

En 1775, Malesherbes, secrétaire d'État de la Maison du Roi, chargé du département de Paris, affirmait le rôle essentiel de la garde de Paris dans la police quotidienne de la ville : selon lui, Paris fut gardé du jour où « la garde de Paris a été instituée, a commencé à prendre une consistance solide... et a été formée en troupes avec soldes » ; auparavant, « malgré les gardes bourgeoises et la troupe du chevalier du guet, il n'y avait aucune sûreté dans la ville, et... on n'y pouvait marcher qu'étant armé et en force » *. On ne saurait mieux marquer l'originalité de la garde : par son organisation militaire et par son recrutement, elle était fondamentalement différente du guet, qu'elle supplanta peu à peu avant de l'absorber en 1771.

Mais les sources sont rarement aussi explicites, car l'attachement aux dénominations et aux institutions séculaires faisait désigner sous le nom de guet les unités nouvelles créées pour remédier à son déclin, et sous le nom d'archers les fusiliers et cavaliers de la garde. Les historiens de la police parisienne ont été ainsi portés à surestimer parfois le rôle du guet.

I. Évolution de la garde : unités, effectifs et commandement

La compagnie du Guet ou de l'Étoile faisait corps avec le Châtelet : son commandant, le chevalier du guet, demeurait près de l'église Sainte- Opportune, au Nord du Châtelet où il était solennellement reçu quand il entrait en charge et où la compagnie s'assemblait le soir. Jusqu'en 1771, le guet comprenait 4 lieutenants, 8 exempts, 139 archers dont 39 à cheval, 4 tambours... Tous étaient pourvus d'offices, de valeur modeste en général : le prix des charges oscillait autour de 2 000 livres pour les archers à cheval en 1765 2. Les gages annuels, constants, étaient de 136 L. 17 s. 6 d. pour l'archer à cheval, de 68 L. 8 s. pour l'archer à pied. Ces officiers défendaient la vénalité de leurs charges au nom de l'intérêt public : « si le citoyen a lieu de se plaindre de la conduite du guet, il aura une ressource sur le mobilier de l'archer en charge, et par privilège sur le prix de sa charge » 3.