Qui exerçait la police à Paris aux XVIIe et XVIIIe siècles ? En partie, les « officiers de police ». Ce terme polysémique cache une grande diversité de situations, puisque plusieurs institutions étaient chargées, parfois contradictoirement, de la police de la ville. En centrant notre propos sur les offices municipaux et ceux de la Lieutenance Générale de Police (le Châtelet), l’on peut observer que des logiques divergentes ont conduit à une multiplication des premiers et à un développement et une transformation des seconds. Les raisons sont, pour les offices municipaux, fiscales et économiques. Elles obéissent à des logiques spécifiques d’encadrement policier de l’espace pour ceux du Châtelet. Dans ce cas, ce sont de nouvelles logiques policières – d’ordre, de sécurité – qui ont façonné un nouveau type d’officiers (les inspecteurs, mais également les commissaires). Cela a eu pour effet de vider de leur substance une grande partie des anciens types d’officiers. Et donc de modifier, in fine, le « métier » de policier.
Paris, capitale de la monarchie absolutiste, posa, dans sa matérialité même, des problèmes d’ordre public aux pouvoirs politiques. Ces problèmes, démographiques, hygiéniques, de circulation et d’organisation sociale (une mobilité accrue), entraînèrent la création d’une institution spécialisée dans la « police » de la ville : la Lieutenance de police. Cette institution, de 1666 à 1789, s’attacha à résoudre les désordres urbains matériels et sociaux, et pour cela déploya des dispositifs policiers nouveaux, pour lesquels elle mobilisa les savoirs du temps tout en en produisant elle-même (plus empiriques). C’est également dans les pratiques des agents sur le terrain que l’on trouve la réalité de ce qu’était la police d’Ancien Régime, qui consista avant tout à occuper l’espace urbain, à le marquer et à l’aménager à la marge afin de produire la sûreté et la propreté des rues. En ce sens, la prise en compte de la réalité urbaine invite à croiser histoire urbaine et histoire de la police.